SCI : L’attribution exceptionnelle de la totalité du déficit foncier à un associé n’est pas léonine
Selon l’article 8 du Code général des impôts, les associés de sociétés civiles sont personnellement soumis à l’impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. Selon une jurisprudence constante (par exemple : CE 26 avril 1976 n° 93212), les droits dans la société sont ceux qui résultent des statuts, sauf dans le cas où un acte ou une convention passée avant la clôture de l’exercice a pour effet de conférer aux associés des droits dans les résultats sociaux différents de ceux qui résulteraient de la seule application des statuts.
Le capital d’une SCI familiale était détenu par les parents à hauteur de 0,5% chacun, les 99% restants étant répartis entre les trois enfants. La SCI a réalisé des pertes importantes au cours des exercices 2014, 2015 et 2016. Par trois assemblées générales tenues avant le 31 décembre de chacune de ces années, les associés décidaient d’attribuer la totalité des pertes de l’exercice aux parents, qui ont donc déduit les déficits fonciers correspondants.
L’administration fiscale a remis en cause la déduction par les parents de ces déficits fonciers, soutenant notamment que l’attribution de la totalité du résultat à un ou plusieurs associés était réputée non écrite en application de l’article 1844-1 du Code civil (prohibition des clauses léonines, définies comme les stipulations qui attribuent à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l’exonérant de la totalité de pertes, ou excluant un associé totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes).
Le Conseil d’Etat, confirmant l’arrêt de la Cour administrative d’appel, juge que les assemblées générales attribuant aux parents la totalité des pertes enregistrées par la SCI pour les exercices clos en 2014, 2015 et 2016 ne constituaient pas des clauses léonines réputées non écrites ; en effet ces décisions ne dérogeaient que de manière ponctuelle au pacte social.
Cette décision rejoint l’analyse de la Cour de cassation en matière de droit des sociétés (voir par exemple : Com. 13 février 1996 n° 93-21.140 et 94-12.225, à propos de la renonciation par certains associés à percevoir les résultats d’un exercice).
La possibilité d’attribuer ponctuellement les résultats déficitaires de la SCI aux parents permet donc d’optimiser les effets fiscaux des investissements immobiliers en déficit foncier, tout en organisant la transmission du patrimoine aux enfants.