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Plus-value apportée à un bien indivis : le dévouement ne paie pas

Selon une jurisprudence bien établie de la Cour de cassation, l’attribution par lots n’est envisageable qu’en cas d’accord amiable entre les indivisaires. Par ailleurs, la Cour rappelle les conditions de prise en considération de la plus-value apportée au bien par un indivisaire.

Trois frères avaient hérité de leurs parents d’une maison d’habitation. Les rapports s’étant détériorés, une demande de partage judiciaire a été introduite.

Afin de faciliter le partage, deux des indivisaires avaient fait réaliser un état descriptif de division de l’immeuble en lots d’égale valeur, et sollicitaient devant la juridiction l’attribution à chacun de l’un de ces lots. La Cour d’appel avait rejeté la demande en prenant argument du risque de mésentente entre les futurs copropriétaires.

Agissant par substitution de motif, la Cour de cassation rappelle qu’en l’absence d’accord entre tous les indivisaires, les lots (qui doivent être d’égale valeur) doivent être tirés au sort, et ne peuvent faire l’objet d’une attribution. En d’autres termes, l’un des indivisaires ne peut être forcé par les autres à accepter un lot plutôt qu’un autre, seul le sort en décidant.

La loi précise, à ce sujet, que lorsque le partage touche une unité économique ou un ensemble de biens, il convient d’éviter que la division en entraîne la dépréciation (article 830 du Code civil).

Par ailleurs, l’un des indivisaires avait, par son activité personnelle (réalisation de travaux de terrassement), permis la conservation et l’amélioration de l’immeuble. Il sollicitait donc que ses droits dans le partage soient augmentés de la plus-value qu’il avait apportée au bien. Cette demande est rejetée par la Cour de cassation, qui rappelle une distinction essentielle :

  • L’indivisaire qui gère un bien indivis a droit à rémunération de son activité (art. 815-12 du Code civil),
  • L’indivisaire qui a amélioré le bien à ses frais a droit à une indemnité calculée sur la base de la plus-value occasionnée par cette amélioration (art. 815-13 du Code civil).

Il résulte de ces textes que seule une dépense financière exposée pour l’amélioration du bien indivis ouvre droit à l’indemnité prévue par l’article 815-13. A contrario, si seule l’activité personnelle d’un indivisaire (son « industrie ») en est à l’origine, l’intéressé n’a droit qu’à une rémunération (calculée, notamment, selon le temps passé).

Si l’arrêt n’est pas novateur, il vient rappeler que, si la gestion d’une indivision (qu’elle soit successorale comme en l’espèce, conventionnelle, matrimoniale etc.) peut sembler simple (plus simple, par exemple, que celle d’une SCI), elle est néanmoins encadrée par des principes dont l’on ne peut s’extraire une fois la discorde installée entre indivisaires. Même dans le cadre familial, la rigueur s’impose…

Cass. Civ. 1e, 15 septembre 2021, 19-24.014

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