Rapport à succession : comment prendre en compte la plus-value constatée sur un bien subrogé ?
La règle du rapport des libéralités consiste à inclure dans la succession les donations consenties par le défunt, afin de garantir le respect des droits des héritiers. L’application de cette règle peut s’avérer relativement complexe, par exemple lorsque la somme d’argent reçue par donation a fait l’objet d’un remploi pour l’acquisition d’un bien immobilier qui a ensuite fait l’objet de travaux d’amélioration avant d’être revendu. Sur quelle valeur convient-il de fonder le rapport ?
Interrogée sur cette question, la Cour de cassation vient de rappeler dans un arrêt du 17 novembre dernier que dans une telle hypothèse, il convient de rechercher la valeur que le bien (l’immeuble acquis au moyen des fonds donnés) aurait eue à l’époque du partage dans l’état où il se trouvait au moment de la donation (c’est-à-dire sans prendre en compte les travaux réalisés par le donataire).
En l’espèce, une personne avait reçu par donation de sa mère une somme d’argent, qui avait ensuite été affectée au paiement d’une partie du prix d’achat d’un bien immobilier, le donataire finançant le complément du prix ainsi que les travaux au moyen de fonds non issus de la donation.
Le bien immobilier avait été revendu quelques années après avec une importante plus-value.
À la suite du décès de la mère, la donation est rapportée à la succession et un litige survient entre les héritiers quant au montant à prendre en compte au titre du rapport.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Reims qui s’était contentée de déduire du prix de vente le montant des travaux (sans tenir compte de la plus-value générée par ces travaux).
En se fondant sur les dispositions de l’article 860 (alinéa 2) du Code Civil, la Cour de cassation vient rappeler que si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné (en l’occurrence la maison acquise pour partie au moyen d’une somme d’argent reçue d’une donation rapportable), on tient compte de la valeur de ce nouveau bien à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de l’acquisition sans s’attacher aux travaux réalisés entre temps par le donataire.
Les magistrats ont donc considéré que pour valoriser le montant du rapport, il fallait prendre en compte la valeur de la maison sans les travaux (mais augmentée d’une plus-value qui pourrait être, en tout ou partie, la conséquence de ceux-ci, ce qui paraît discutable).
Cet arrêt vient confirmer la solution déjà rendue par la Cour de cassation en pareille situation. Ce contentieux aurait pu être évité si le donateur avait opéré une donation-partage, qui aurait ainsi figé la valeur des biens transmis au jour de l’acte.