Sociétés de personnes : l’annulation d’une cession de parts ne modifie pas rétroactivement la répartition fiscale du résultat
Selon le Conseil d’Etat, l’annulation de la convention ayant pour effet d’établir une répartition des résultats différente de celle résultant des statuts n’a pas rétroactivement pour effet de modifier la répartition de l’imposition.
Une SCI avait été constituée entre deux personnes, disposant chacune de quinze parts sociales. L’un des associés avait, en 2011, cédé quatorze de ses parts à l’autre. Au titre de l’année 2011, l’associé acquéreur avait donc déclaré sa quote-part du résultat fiscal à hauteur de 29/30e correspondant à sa participation à la clôture de l’exercice. Mais l’acte de cession de parts avait été ultérieurement annulé par le Tribunal de Grande Instance, en raison d’un vice du consentement.
A la suite d’une vérification de comptabilité, le résultat de la SCI relatif aux années 2010 et 2011 avait été substantiellement rehaussé ; ce supplément d’imposition avait donc été réparti entre les associés pour la part correspondant à leurs droits dans la société au titre de ces années, qui, au passage, écopaient également d’une majoration de 80%.
Se fondant sur le caractère rétroactif de l’annulation (« le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé », article 1178 alinéa 2 du Code civil), l’associé qui avait supporté 29/30e du redressement prétendait que l’annulation de l’acte de cession de parts aurait dû ramener sa part dans le résultat (et la majoration) à celle résultant de la situation antérieure à la cession.
Confirmant l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille, le Conseil d’Etat précise que si une convention modifie les droits des associés dans les bénéfices sociaux tels qu’ils résultent de la seule application des statuts, « les bases d’imposition des associés doivent correspondre à cette nouvelle répartition des résultats sociaux. L’annulation d’un tel acte ou d’une telle convention postérieurement aux années d’imposition ne peut affectée la règle fixée par [les articles 8 et 12 du Code général des impôts] en vertu de laquelle sont seuls redevables de l’impôt dû sur les résultats de l’exercice les associés présents dans la société à la clôture de l’exercice », ce principe s’appliquant également aux rehaussements apportés ultérieurement par l’administration fiscale.
Suivant les conclusions du rapporteur public, le Conseil d’Etat applique le principe d’intangibilité du fait générateur de l’impôt, principe bien établi mais jamais encore appliqué à une telle situation. Cela n’en a pas moins pour effet d’établir une discordance entre l’économique et le fiscal. Le contribuable bénéficie néanmoins de plusieurs moyens pour en atténuer les effets, que ce soit par la voie de la réclamation à l’administration fiscale, ou par la voie judiciaire envers celui des associés qui s’est enrichi à ses dépens.