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L’imposition immédiate du crédit-vendeur sur la totalité de la plus-value est conforme à la Constitution

En matière de cession de titres, il résulte de l’article 150-0 A du Code général des impôts que la plus-value est imposable au jour du transfert de propriété. L’administration précise que ce principe ne souffre pas d’exception, même si le prix est payé par échéances successives, à terme, voire s’il n’est pas payé (BOI-RPPM-PVBMI-30-10-10).

Le contribuable peut donc être amené à payer un impôt sur un revenu dont il ne dispose pas, ce qui semble difficilement compatible avec les termes de l’article 12 du Code général des impôts : « l’impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ».

Contestant le redressement dont ils faisaient l’objet, des contribuables prétendaient devant le Conseil d’État que, faute pour le contribuable ayant cédé ses titres au moyen d’un crédit-vendeur d’obtenir une réduction de l’imposition en fonction des sommes réellement perçues, cette modalité d’imposition méconnaissait le principe d’égalité devant les charges publiques et l’exigence de prise en compte des capacités contributives des contribuables.

Jugeant que la question présentait un caractère sérieux, le Conseil d’État avait renvoyé au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité visant l’article 150-0 A du Code général des impôts (CE 13 octobre 2021, N° 452773).

Le Conseil constitutionnel juge que les dispositions sont conformes à la Constitution : « il résulte d’une jurisprudence constante du Conseil d’État que la date à laquelle la cession doit être regardée comme réalisée est celle à laquelle s’opère le transfert de propriété (…). Le fait qu’une partie du prix de cession doive être versée de manière différée par le cessionnaire au contribuable, le cas échéant par le biais d’un crédit vendeur, relève de la forme contractuelle qu’ils ont librement choisie. (…) la circonstance que des évènements postérieurs affectent le montant du prix effectivement versé au contribuable est sans incidence sur l’appréciation de ses capacités contributives au titre de l’année d’imposition ».

A l’appui de son raisonnement, le Conseil précise « à la date de la vente, le contribuable a acquis une créance dont il peut disposer librement ». Précision troublante puisqu’il résulte de l’article 12 du Code général des impôts qu’à l’exception des régimes d’imposition professionnels (BIC, BNC, BA), l’impôt sur le revenu n’est pas fondé sur une logique de créances acquises, mais de revenu disponible.

En tout état de cause, il convient d’être particulièrement vigilant lors de cessions assorties d’un terme de paiement au décalage entre la perception des fonds et l’exigibilité de l’impôt. Rappelons enfin qu’au cas où le prix de vente devait ne pas être payé au terme convenu, il reste possible de réclamer, par la voie contentieuse, la restitution de l’impôt sur la plus-value déjà payé.

Conseil Constitutionnel, décision 2021-962 QPC du 14 janvier 2022

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