Prêt relais contracté pour l’acquisition d’un bien indivis : une dépense de conservation ouvrant droit à indemnité 

Si l’indivision est généralement assimilée à une condition subie, elle peut également être volontaire et résulter d’une acquisition en commun. Dans une telle situation, les problématiques entourant les modalités de financement de l’acquisition sont rarement appréhendées en amont, et c’est au juge qu’il appartient de départager.

C’était notamment le cas dans l’affaire sur laquelle la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée le 26 janvier dernier.

Trois personnes avaient acquis un bien immobilier en indivision. Pour ce faire, trois prêts avaient été contractés : deux prêts amortissables et un prêt relais. Après le décès de l’un des indivisaires, ses héritiers avait fait valoir une créance à l’encontre de l’indivision au titre du remboursement effectué par leur défunt parent sur ses fonds personnels, tant des prêts amortissables que du prêt relais. La Cour d’appel avait fait droit à leur demande.

Les autres indivisaires avaient alors formé un pourvoi en cassation en considérant que le prêt relais constituait une dépense d’acquisition, et non une dépense de conservation, et ne devait donc pas donner lieu à indemnité.

Les magistrats de la première chambre civile de la Cour de cassation ont confirmé la décision rendue par la Cour d’appel. Se fondant sur l’article 815-13 du Code Civil, la Cour juge que le règlement d’échéances d’emprunts ayant permis l’acquisition d’un immeuble indivis, effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien. La succession de l’indivisaire défunt était donc titulaire d’une créance sur l’indivision à hauteur des sommes remboursées, créance qui pourra être payée sur l’actif par prélèvement sans attendre le partage (article 815-17 du Code civil).

La Cour avait déjà jugé (Civ. 1re, 7 juin 2006, n° 04-11.524) que, dès lors que des deniers personnels ont été utilisés pour le remboursement d’un prêt ayant servi à l’acquisition d’un bien indivis, l’indivision doit indemniser l’indivisaire ayant procédé au remboursement ; et cela, sans distinction quant à la nature du prêt (prêt amortissable ou prêt relais).

Si l’indivision reste un outil pertinent (le recours à la SCI ne se justifiant pas systématiquement), les enjeux juridiques et financiers, potentiellement complexes, doivent faire l’objet d’une attention toute particulière, afin d’éviter que l’investissement commun ne se termine au tribunal. 

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 26 janvier 2022, 20-17.898

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